Face à la pression populaire, Hosni Moubarak a fait plus de concessions en trois jours qu’en trente ans de pouvoir sans partage. Le gouvernement dans son ensemble a été démissionné. Omar Souleimane a été nommé vice-président de la république. Un poste qui existe dans la constitution égyptienne mais n’a jamais été repourvu depuis 1981. L’Assemblée nationale a été dissoute et la « correction » des législatives de novembre et décembre 2010 outrageusement truquées par le pouvoir, à en croire les observateurs indépendants, est désormais à l’ordre du jour. Last but not the least, il a décidé de ne pas prendre part l’élection présidentielle de septembre. Ces "os à ronger" donnés dans l’urgence sont considérés par l’immense majorité d’égyptiens qui, du Caire à Alexandrie en passant par Assouan et Assiout, continuent d’exiger "hic et nunc" le départ du raïs, comme le ravalement de façade d’un pouvoir aux abois.
En souhaitant ménager à Hosni Moubarak "une porte de sortie honorable et digne", l’armée égyptienne a littéralement pris fait et cause pour l’ex général. Cette obstination à vouloir envers et contre tout garder la main sur le destin de son pays a quelque chose d’éminemment absurde. Car, malgré une santé plus que fragile et définitivement sur la pente descendante, "la vache qui rit" ne se résout pas à écouter un peuple dont il affirme continuer à se soucier du bien-être. Cette subite sollicitude tranche en tous cas avec ce qu’aura été son règne. En trente années, le raïs s’est plus préoccupé à pactiser avec Washington pour faire copain-copain avec Israël, qu’à remédier à la déliquescence des conditions de vie de la population qui a débouché sur les émeutes de la faim d’avril 2008.
Même si Hosni Moubarak n’a pas trouvé plus bête que lui, allusion faite à la mauvaise blague très répandue au Caire selon laquelle depuis Nasser, chaque raïs est remplacé par un raïs plus bête que lui, les égyptiens n’en veulent plus et n’en peuvent plus de leur extrême paupérisation et de l’état d’urgence quasi permanent dans lequel ils vivent depuis octobre 1981.
Le locataire du palais d’Abedin feint de n’avoir pas compris le message. Mais il ne tient plus comme par le passé, le couteau par le manche. Et cela change tout !